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Division - New York
Un nouveau rapport du GIEC confirme que le stockage
du CO2 pourrait être une arme efficace contre
le changement climatique, mais seulement si des obstacles
clefs sont levés.
Montréal, le 26 septembre 2005 (PNUE/OMM) -
Le piégeage et le stockage du dioxyde de carbone
(CO2) émanant des centrales électriques
et des usines avant qu'il ne pénètre dans
l'atmosphère pourraient contribuer dans une large
mesure à limiter les changements climatiques.
C'est ce qui ressort d'un nouveau rapport d'évaluation
auquel le Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'Évolution
du Climat (GIEC) a mis aujourd'hui en ce lieu la dernière
main.
"Si l'efficacité énergétique
et des sources d'énergie plus propres demeurent
la solution la plus adéquate au problème
du changement climatique, ce nouveau rapport démontre
que le piégeage et le stockage du dioxyde de
carbone peuvent constituer une mesure complémentaire",
a déclaré Klaus Töpfer, directeur
exécutif du Programme des Nations Unies pour
l'Environnement (PNUE).
"Étant donné que les émissions
de dioxyde de carbone, principale cause des changements
climatiques, continuent d'augmenter dans de nombreuses
régions du monde, il est primordial que nous
exploitions toute possibilité qui s'offre à
nous de limiter leur impact sur le climat mondial. Le
piégeage et le stockage du CO2 ont manifestement
un rôle à jouer à cet égard",
a déclaré Michel Jarraud, Secrétaire
général de l'Organisation Météorologique
Mondiale (OMM).
Selon diverses études, les technologies qui
seraient mises en œuvre dans ce contexte pourraient
abaisser de 30 % ou plus le coût de la lutte contre
les changements climatiques. En outre, le piégeage
et le stockage du CO2 dans des formations géologiques
pourraient représenter 15 à 55 % de la
totalité des réductions d'émissions
requises (entre 220 et 2 200 Gigatonnes de CO2) d'ici
à 2100 pour pouvoir stabiliser les concentrations
de gaz à effet de serre dans l'atmosphère.
Bon nombre d'éléments des techniques
de piégeage et de stockage du dioxyde de carbone,
qui permettent de piéger ce gaz, de l'acheminer
dans des canalisations et de l'injecter dans des formations
géologiques dans le cadre de plusieurs applications,
sont déjà au point. Trois projets de ce
type sont déjà opérationnels en
Algérie, au Canada et dans la mer du Nord, au
large de la côte norvégienne. Le piégeage
du CO2 produit par les grandes centrales électriques
devra faire l'objet de nouvelles démonstrations
dans les années voire les décennies à
venir. Quant aux autres applications envisageables,
telles que le stockage du CO2 dans l'océan ou
sa fixation dans des carbonates stables, elles en sont
encore au stade expérimental.
Le piégeage et le stockage du CO2 pourraient
toutefois se heurter à d'importants obstacles
qui ne sont pas de nature technique. Par exemple, tant
que les gouvernements n'auront pas adopté des
politiques de lutte contre les changements climatiques
qui pénalisent les émissions de CO2, les
différents acteurs ne seront pas incités
à recourir aux techniques en question.
Par ailleurs, si les capacités de stockage des
réservoirs géologiques existants seront
"probablement" suffisantes, le volume exact
disponible n'est pas connu avec certitude, en particulier
dans certaines régions qui connaissent une croissance
économique rapide, telles que le sud et l'est
de l'Asie.
Comme les techniques de piégeage et de stockage
du CO2 requièrent de l'énergie, leur adoption
pourrait accroître le recours aux combustibles
fossiles. Une centrale électrique équipée
pour piéger le CO2 aurait besoin de 10 à
40 % d'énergie en plus par rapport à une
centrale ordinaire pour produire la même quantité
d'électricité.
Aujourd'hui, le coût de production de l'électricité
varie de 0,04 à 0,06 dollar É.-U. environ
par kilowattheure. L'adoption des techniques de piégeage
et de stockage du dioxyde de carbone en l'état
actuel des choses augmenterait ce coût de quelque
0,01 à 0,05 dollar É.-U. par kilowattheure.
Le coût du piégeage et du stockage du CO2
pourrait baisser à l'avenir grâce aux progrès
techniques et aux économies d'échelle,
peut-être de 20 à 30 % sur les dix prochaines
années pour autant que les activités de
recherche–développement et d'exploitation
soient menées à un bon rythme. Il pourrait
subir toutefois le contrecoup de la hausse des prix
du pétrole, ce qui fait planer, comme le précise
le rapport, de grandes incertitudes sur son évolution
à court ou à moyen terme.
Pour que les techniques de piégeage et de stockage
du CO2 contribuent à abaisser les émissions
de ce gaz engendrées par la production d'électricité,
de loin le domaine d'application le plus prometteur,
le prix fixé pour les réductions d'émissions
doit rester supérieur à 25-30 dollars/tCO2
(tonne de CO2) sur l'ensemble de la durée de
vie des équipements (en dollars de 2002). Les
techniques en question pourraient être prises
en considération dans l'échange des droits
d'émission ou les mécanismes de Kyoto,
mais il faudra peut-être affiner la méthode
de prise en compte des réductions d'émissions.
La formule la plus économique pour le stockage
du CO2 consiste à l'injecter dans des formations
géologiques, d'autant plus que l'industrie pétrolière
et gazière a acquis une certaine expérience
dans ce domaine. En outre, un large pourcentage des
centrales électriques et autres sources d'émission
fixes se trouve à moins de 300 km de réservoirs
de stockage potentiels tels que les champs pétrolifères
et de gaz naturel, les veines de charbon inexploitables
et les aquifères salins profonds.
Les techniques servant à injecter dans les océans
le CO2 piégé ont peut-être aussi
un avenir, mais elles en sont encore au stade expérimental
et n'ont pas été testées à
grande échelle. Elles consistent à libérer
du CO2 dans une colonne d'eau océanique via une
canalisation fixe ou à partir d'un navire qui
se déplace, ou à le déposer sur
le plancher océanique à plus de 3 000
m de profondeur, là où ce gaz est plus
dense que l'eau. L'inconvénient est que des organismes
marins pourraient en pâtir et quoique l'on ne
sache pas bien quelles seraient, sur le long terme,
les conséquences pour l'environnement de cette
modification de la chimie des océans, une nette
acidification de ces derniers pourrait résulter
de l'injection de CO2 à grande échelle.
Les techniques consistant à stocker le CO2 de
façon quasi permanente en le transformant en
des carbonates minéraux inorganiques en sont
elles aussi au stade expérimental, mais certaines
applications ont déjà fait l'objet de
démonstrations sur une petite échelle.
Toutefois, ces techniques sont encore trop énergivores
et auraient besoin d'être perfectionnées
pour être véritablement envisageables.
Par ailleurs, il est techniquement possible d'utiliser
le CO2 piégé dans des processus chimiques
industriels, mais le potentiel de réduction nette
des émissions de CO2 est quasi nul.
Outre les considérations d'ordre technique et
financier, il faut aussi prendre en compte, pour s'assurer
le soutien du grand public, les aspects qui ont trait
à la santé, à la sécurité
et à l'environnement ainsi que les aspects juridiques.
Les risques potentiels sont les suivants: fuites lors
du piégeage, du transport et de l'injection du
CO2 (risque comparable à celui inhérent
à des processus industriels similaires) et fuites
lentes émanant des sites de stockage (risque
faible si les réservoirs sont soigneusement sélectionnés
et si l'on a recours aux meilleures techniques disponibles).
Quoi qu'il en soit, la question de savoir comment les
opérations d'injection de CO2 dans les eaux internationales
seraient considérées en regard du droit
international ne manquerait pas de se poser.
Le rapport spécial du GIEC sur le piégeage
et le stockage du dioxyde de carbone a été
rédigé par une centaine d'experts venant
de plus de 30 pays et révisé par un grand
nombre d'experts et de gouvernements. Répondant
à la demande faite par les Parties à la
Convention cadre des Nations Unies sur les changements
climatiques (CCNUCC), ce rapport fait le point sur les
études les plus récentes consacrées
à cette question dans des revues scientifiques
et techniques du monde entier. Le Groupe d'experts intergouvernemental
sur l'évolution du climat a été
créé en 1988 sous les auspices de l'OMM
et du PNUE.
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